Nécessité d'agir pour établir une paix durable dans le Caucase - Question écrite
M. Pierre Dharréville attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation dans le Caucase. Il y a bientôt deux ans, l'Azerbaïdjan mettait un terme aux négociations de paix et envahissait, avec le soutien de la Turquie, le haut Karabakh. Depuis, les agressions contre l'Arménie n'ont jamais cessé. Les 13 et 14 septembre derniers, les forces militaires azerbaïdjanaises ont agressé une nouvelle fois plusieurs dizaines de villes et villages arméniens, dont Goris, Jermuk, Kapan, Vardenis et Sotk. La violence contre les populations arménienne est insoutenable : viols, exécutions, tortures, documentée par de nombreuses ONG.
A l'ombre de la guerre en Ukraine, le Président Ilham Aliev entend poursuivre sa sourde besogne. Au total, en septembre, au moins 286 personnes ont été tuées de part et d'autre dans ces nouveaux affrontements à la frontière entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, faisant craindre une nouvelle guerre d'ampleur. L'Azerbaïdjan occupe désormais 50 kilomètres carrés du territoire arménien, qu'il entend annexer, dans une indifférence quasi générale. Cet épisode intervient peu après que l'Union européenne (UE) et l'Azerbaïdjan aient conclu un accord pour augmenter les livraison de gaz à l'Europe à l'issue duquel le Président Aliev s'est senti renforcé. Il intervient aussi alors que la Russie qui assurait jusqu'à présent un fragile statu quo dans la région est toute occupée à livrer la guerre à l'Ukraine. L'Arménie a sollicité la plus haute juridiction de l'ONU après ces attaques de septembre et lui a demandé d'enjoindre « expressément » à l'Azerbaïdjan de protéger les personnes arrêtées après la guerre de 2020. Pour le moment, la médiation est essentiellement menée sous l'égide de l'UE et des Etats-Unis. Les chefs des diplomaties arménienne et azerbaïdjanaise se sont retrouvés à Genève le 2 octobre pour commencer à travailler sur un projet de traité de paix. Le 6 octobre, à Prague, des négociations ont eu lieu entre Nikol Pachinian, Ilham Aliev, Emmanuel Macron et le président du Conseil européen, Charles Michel. Le secrétaire du Conseil de sécurité arménien, Armen Grigoryan, a déclaré il y a peu que les deux parties sont convenues de signer ce traité « d'ici la fin de l'année », mais que ces « mécanismes » et le tracé des frontières sont encore en discussion.
L'UE doit déployer ces jours-ci une mission civile en Arménie, dans la zone frontalière. Composée de 40 observateurs et envoyée pour une durée de deux mois, elle devrait permettre de « renforcer la confiance » entre les deux pays ennemis et de contribuer à délimiter la frontière. On ne peut que saluer cette avancée. Mais on peut s'inquiéter en se demander si cela sera suffisant d'autant que l'Azerbaïdjan a déjà failli à ses engagements par le passé. L'Europe, en tant que désormais partenaire commercial avec l'Azerbaïdjan, saura-t-elle tenir ce rôle ? Que pourra par ailleurs une mission civile en cas de nouvelle escalade militaire d'ici la signature du traité ? Quid d'une enquête indépendante internationale sur les crimes de guerre ? Face à ces incertitudes, il est nécessaire que les instances internationales se positionnent et agissent.
Il faut également rappeler qu'une paix durable dans cette région suppose un règlement définitif de la question du statut de la république d'Artsakh, qui a proclamé par référendum libre et démocratique son indépendance, et qui cristallise les tensions entre Arménie et Azerbaïdjan. Aussi M. Pierre Dharréville demande à Mme la Ministre que la France fasse entendre sa voix pour que l'ONU intervienne par l'envoi de forces d'interposition pour garantir un cessez-le-feu, le respect de l'intégrité territoriale de l'Arménie et de la république d'Artsakh, préalable nécessaire à une résolution diplomatique pérenne des tensions dans le Caucase.