Le courrier de Genève titrait voici quelques jours : « Cuba asphyxiée depuis la Suisse ». « Les patients cubains du Covid-19 n’auront pas droit aux respirateurs suisses, sur ordre des Etats-unis, à l’instar d’autres équipements médicaux, expliquait le quotidien suisse. Mais le blocus exercé depuis la Suisse est aussi financier. » En quelques lignes voici résumée une histoire qui dure depuis des années.
Depuis bientôt 60 ans, on ne sait même pas s’ils seraient capables encore de dire pourquoi, les Etats-Unis ont imposé à l’île cet embargo criminel. Le fiasco du débarquement dans la baie des Cochons, puis les nationalisations débouchant sur l’expropriation de compagnies américaines avaient déclenché cette opération de rétorsion. Et encore aujourd’hui, s’expriment avec acharnement cette vieille haine, ce refus de voir si près planté un drapeau communiste. Au point d’interdire qu’on expédie à la population cubaine les respirateurs que leur état a acheté. Pendant ce temps, les médecins cubains, dont le savoir-faire est reconnu, en particulier dans la lutte contre les épidémies, s’exportent pour aider d’autres pays à faire face. D’autres pays comme la France, en Martinique, en Guadeloupe ou en Guyane. Mais tout le monde obéit au diktat américain. Huit organisations suisses ont dénoncé «un blocus qui met en danger la vie de nombreux Cubains». Car cela vient s’ajouter aux difficultés d’approvisionnement en nourriture, carburant et devises internationales. Les deux sociétés fabricantes de respirateurs, qui ont déjà travaillé avec Cuba ont été rachetées il y a deux ans par une société étasunienne. Le journal rapporte que depuis septembre 2019, les banques helvétiques ont suspendu tous les paiements internationaux. « En tant que banque active au plan mondial », UBS se déclare « tenue de se conformer à de nombreuses exigences légales et réglementaires », se réfugiant derrière « les sanctions actuellement prises par la Suisse, l’ONU, l’Union européenne et les Etats-Unis ». Or le blocus est condamné par la Suisse, l’ONU et l’Union européenne, mais on applique la liberté de vendre... Une belle marque d’humanité.
Un autre blocus se poursuit à Gaza depuis treize ans. Les alertes sont nombreuses car pour nombre d’observateurs, il a placé le système de santé dans une situation d’extrême faiblesse, avec un manque criant de médicaments et d’équipements. On sait ce qu’il en coûte. On y trouve selon l’ONG Première urgence internationale seulement 62 respirateurs, et 70 lits de soins intensifs pour une population de plus de 2 millions de personnes. Non loin, en Cisjordanie, des opérations militaires de colonisation sont en cours : raids, démolitions et confiscations… Même pendant la pandémie, le gouvernement de Benyamin Netanyahou, engagé dans une surenchère sans fin, continue sa guerre, il poursuit dans sa tentative insensée et insupportable d’écrasement du peuple palestinien. Pour agrémenter le tableau, on apprend qu’au Royaume-Uni, la banque HSBC aurait décidé de suspendre tout ordre de paiement à destination d’Interpal, « une association à la population civile palestinienne. « En tant que banque mondiale, nous pouvons parfois décider d’empêcher certaines transactions, même si elles sont autorisées par les lois locales. Nous reconnaissons que certaines personnes peuvent être déçues de cette décision et nous sommes désolés pour tout inconvénient que cela pourrait causer », a déclaré un porte-parole, selon le média Middle east eye.
On notera, s’il était besoin, dans ces deux exemples, combien la finance emprunte avec parcimonie à la vertu, fussent les blés sous la grêle.
La pandémie frappe fort dans le monde entier et c’est pourtant bien la solidarité qui doit être mise à l’ordre du jour, à cent mille lieues de la guerre, à cent mille lieues des blocus et des murs. Et à cent mille lieues des rodomontades imbéciles de Donald Trump qui torpille l’Organisation mondiale de la santé. Nous aurons besoin de partager en temps réel les traitements et les vaccins.
J’ai attrapé cette citation de Walter Benjamin dans un article de l’ami Roland Gori, qu’il juge applicable au virus : « Personne n’a le droit de conclure une paix séparée avec la pauvreté ». Fou qui croit pouvoir conclure une paix séparée avec le virus.