Lutte contre la fraude au CPF. Il ne faut pas économiser sur la formation

Lutte contre la fraude au CPF - Séance du 06/10/2022

Explication de vote

 

On dirait que vous êtes surpris : il existe une fraude au CPF ! Des démarches commerciales très agressives sont utilisées pour encourager les gens à vider leur CPF sans qu’ils bénéficient pour autant d’une formation qualifiante. Ces pratiques sont scandaleuses, mais cette fraude et cette agressivité commerciale, qui méconnaissent les enjeux de la formation professionnelle, étaient toutes deux inscrites dans la réforme dont vous louez les mérites avec emphase. Vous avez monétisé le compte personnel de formation, vous avez désintermédiatisé l’accès à la formation, vous avez marchandisé la formation professionnelle.

 

À chaque fois que vous vous emparez d’un sujet, vous libéralisez, vous privatisez, vous dérégulez, vous marchandisez, et cela fait des dégâts.

 

Vous avez créé les conditions de ces dérives. Il y a de l’argent, un marché et des personnes qui veulent faire des profits. Bien entendu, dans la majorité des cas, de vraies formations professionnelles sont dispensées et les organismes accompagnent les salariés dans leur parcours de qualification. Nous avons besoin d’eux. Je regrette donc l’affaiblissement continu du service public de l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), quasiment ignoré du dispositif. 

  
 

En réalité, en ouvrant le marché de la formation professionnelle, vous avez désigné les titulaires du CPF – un porte-monnaie – comme des clients à séduire et à hameçonner. Dans ce secteur, les dépenses de marketing font l’objet d’une véritable débauche : chaque organisme cherche à s’imposer dans la course à l’échalote, et c’est autant d’argent destiné à la formation professionnelle qui n’y est pas consacré. Nous courons ainsi le risque d’un abaissement programmé de l’offre de formation, ou tout du moins d’une formation à deux vitesses. Les formations aux langues étrangères et au permis de conduire ont déjà pris le dessus : elles sont sans doute utiles dans la recherche et l’exercice d’un travail, mais elles ne correspondent pas nécessairement à une formation professionnelle qualifiante. Les salariés, les entreprises et la société tout entière ont pourtant besoin de voir s’élever le niveau de qualification pour faire face aux défis de notre temps.


Le deuxième problème soulevé par la formation professionnelle est celui du respect du travail, des métiers et de l’humain au travail. En abaissant le contenu de la formation professionnelle, en se contentant de former à des compétences ciblées ou éparses, on forme simplement à l’exécution d’une tâche, on déqualifie, on ne crée pas les conditions de l’épanouissement au travail. Partout dans la société, nous observons la crise du travail, une perte de sens, de la souffrance et du travail gâché.
Dans la continuité de notre débat d’hier sur la validation des acquis de l’expérience (VAE), permettez-moi d’espérer que nous ne verrons pas croître le marché de la VAE au détriment des formations qualifiantes. 
Leur articulation est la garantie d’un véritable droit, mais elle ne cadre pas avec votre logique adéquationniste – faire rentrer un cube dans un rond. Si, avec la VAE, vous souhaitez faire l’économie de la formation qualifiante pour répondre en mode dégradé aux besoins économiques, alors de lourds problèmes finiront par se poser.

 
 

La VAE est un droit véritable : elle doit permettre une reconnaissance des acquis de l’expérience et s’accompagner des compléments nécessaires pour offrir une qualification pleine et entière, donnant à un individu les moyens de s’épanouir dans le travail et d’y être reconnu.


Enfin, il ne faudrait pas que certains employeurs se croient dédouanés de leur devoir à l’égard des salariés en matière de formation professionnelle bien qu’il n’apparaisse pas dans le CPF. Les dispositions que vous nous proposez aujourd’hui ne s’attaquent pas à ce type de fraude.


Qui pourrait toutefois s’opposer à la lutte contre la fraude et à l’interdiction du démarchage téléphonique ? Pas nous ! L’application du présent texte constituerait un moindre mal. Les appétits financiers que suscitent les fonds de la formation professionnelle ne s’éteindront pas pour autant. Tandis que France compétences écope, ou plutôt creuse sa dette, certains se repaissent. On ne doit pas économiser sur la formation professionnelle, mais on ne doit pas non plus gâcher l’argent qui lui est destiné.

Le groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES soutiendra la proposition de loi et remercie les députés du groupe Démocrate pour leur initiative. Les dispositions contenues dans le texte permettront de limiter la casse, de réguler et d’améliorer la qualité de l’offre de la formation professionnelle. Nous appelons cependant le Gouvernement à prévoir des moyens suffisants pour les services publics chargés de les appliquer. À ce jour, je n’ai malheureusement entendu parler de rien. Enfin, notre groupe tire la sonnette d’alarme : les dérives dont nous parlons sont le signe de problèmes bien plus profonds !

 

 

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Pouvoir d'achat. Il y aura beaucoup de désillusions !

Pouvoir d'achat - Séance du 21/07/2022

Explication de vote

 

Il y avait beaucoup d’attentes et il y aura beaucoup de désillusions. Vous aviez annoncé un projet de loi exceptionnel sur le pouvoir d’achat, pour aboutir à un texte vide des mesures nécessaires. C’est un projet de loi d’affichage, qui fait semblant, et qui comporte aussi des germes toxiques. Ce que nous dit ce texte, c’est que vous ne voulez pas changer de cap : vous voulez continuer à jouer la modération salariale pour l’immense majorité ; vous voulez faire de la France un pays de bas salaires ; vous voulez faire de beaucoup des salariés de notre pays des travailleurs et des travailleuses mal rémunérés, mal protégés ; vous voulez faire de notre pays un nouveau champion du travail qui ne coûte pas cher ; vous voulez la rémunération précaire, en modifiant la structure même de la rémunération du travail – moins de salaires et de cotisations assises sur des cadres collectifs, plus de rémunérations aléatoires et discrétionnaires.

Selon vous, pour lutter contre le chômage, il faut des salaires qui ne soient pas trop élevés. Ajoutons-y des licenciements faciles et des droits à l’assurance chômage réduits : c’est le salaire de la peur du lendemain. Vous prétendez qu’augmenter les salaires alimenterait l’inflation. Dès lors, comment expliquez-vous l’explosion des prix, qui n’a pas attendu la guerre en Ukraine, alors que les salaires – c’est peu de le dire – n’ont connu, de leur côté, aucune explosion. C’est la spéculation, ce sont les profits, ce sont les dividendes, c’est la finance, ce sont les inégalités qui fabriquent l’inflation.


Certains nous disent : c’est la vie, c’est le destin, ainsi va le monde. Et le monde va mal. Jamais nous ne nous habituerons au mépris du travail des ouvriers, des employés, des salariés
, ce d’autant que, par exemple, les patrons du CAC40 voient leur rémunération multipliée par deux en un an. Ce que met en lumière l’aggravation du moment, c’est l’urgence d’intervenir pour assainir une situation inacceptable, où les richesses produites sont accaparées par une poignée de puissants qui savent les utiliser à rebours de l’intérêt des humains et de la planète.


Pendant ce temps, vous mégotez sur le SMIC, vous êtes rattrapés vous-mêmes par les mécanismes de sauvegarde automatiques minimalistes et vous feignez d’en être les instigateurs. On vit mal avec le SMIC, on a du mal à se nourrir, à se chauffer, à se loger, à se déplacer, à se cultiver. On a du mal à faire des choix. On subit sa vie. C’est sur ce terreau que vous venez ensuite vous présenter en sauveurs, en proposant des rémunérations complémentaires qui ressemblent à des pourboires et incitent, pour s’en sortir, à faire des heures supplémentaires. On doit pouvoir vivre dignement de son travail.

 

Pour nous, sur ces bancs, il y a de la colère à vous voir manœuvrer pour éviter une autre répartition des richesses, en faisant tout pour ne surtout pas augmenter les salaires. Dites-nous combien de femmes et d’hommes bénéficieront de ce déplafonnement, de cette mesure aléatoire. Donnez-nous également l’addition pour la sécurité sociale. Dans ce texte, vous multipliez encore les exonérations de cotisations sociales. Vous effacez, d’une certaine façon, cette part du salaire qui constitue des droits solidaires à la protection sociale. Et vous nous expliquerez ensuite qu’il faut réduire ces droits !


Puis vous viendrez nous expliquer qu’on ne peut pas, par exemple, trop augmenter les pensions. Et pour cause ! Vous vous privez des moyens de le faire. Les augmentations des pensions et des minima sociaux que vous proposez, insuffisantes, sont comme un à-valoir pris sur la suite. Entendez ces hommes, et surtout ces femmes, qui vivent difficilement avec leur pension de retraite, parce que l’on a, pendant si longtemps, gelé le point d’indice.

 
 

Entendez ces familles, qui ont de plus en plus de mal à se loger et à payer leur loyer, qu’il faudrait geler.


L’inflation galope et vous marchez au pas, loin derrière, avec des mesures qui sont non seulement insuffisantes, mais également nocives, avec rien, strictement rien, pour prendre la mesure des difficultés, encore plus considérables, de nos concitoyennes et concitoyens des outre-mer.
Heureusement – mince tentative de rachat –, vous avez consenti à déconjugaliser l’AAH, ce qui est bien peu face à l’ampleur des problèmes du quotidien. Vous y ajoutez une politique énergétique qui, en définitive, contribue à affaiblir encore EDF.


Nous voulons vivre bien : voilà ce que dit le pays. Nous avons multiplié les propositions en ce sens. Notre vote, ce matin, se veut un coup de semonce, un signal d’alarme, un appel retentissant. Vous avez dix jours pour enfin choisir d’agir vraiment. Pour construire cette loi que nous appelons de nos vœux, vous nous trouverez toujours disponibles. Mais s’il s’agit de vous accompagner dans une politique qui a déjà produit tant de dégâts, vous nous trouverez face à vous. C’est pourquoi nous ne soutiendrons pas cette version de la loi.

 

 

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Principes de la République. Un texte inefficace, irrecevable, manoeuvrier !

Projet de loi visant à conforter les principes de la République - Intervention générale - Mardi 2 février 2021

Par où commencer ? C’est la question que vous avez dû vous poser vous-mêmes et ça se voit. Et vous auriez dû commencer tout simplement par formuler la question à laquelle vous voulez répondre et par établir clairement un diagnostic. Ainsi, ce n’est pas pour rien que vous avez éprouvé tant de difficultés à trouver un titre à ce projet de loi, à nommer son objet. Pour faire bonne mesure, vous avez donc choisi l’euphémisme : un projet de loi pour le respect des principes républicains. Mettre en oeuvre les principes de la République, c’est finalement l’objet de tout projet de loi qui se respecte. 

Le conseil d’Etat a d’ailleurs dû vous appeler à un peu plus d’humilité dans l’affichage. En effet, ce que vous dites, ce que vous ne dites pas plus exactement, c'est de quelle République parlons-nous ?

Votre texte affichait cependant la vertu d'être un acte visant à nous ressouder autour du bien commun qu’est la République. Mais vous aurez remarqué qu’il se trouve bien peu d’acteurs de la vie sociale et institutionnelle qui lui rendent grâce : il ne suscite aucun enthousiasme dans la société et vous reconnaissez vous même à haute voix vous trouver “bien seuls”.
 
Pourquoi un accueil si frais ? Est-ce parce que vous seriez les Chevalier Bayard de la laïcité ? C’est peu probable. Attention au syndrome de celui qui roule à contresens sur l’autoroute.

J'ai entendu beaucoup de gargarismes sur l'idée d'un "grand texte historique", "digne de l'oeuvre de 1905", vous plaçant sur l"a voie médiane", et j'en passe. On a le droit de rêver sur la pointe des pieds mais vous entrez-là dans l'oeuvre de voeu pieux. D'autant que par certains aspects, vous vous retournez plus vers Émile Combes que vers Aristide Briant, qvec quelques accents sarkozystes concordataires qui relèvent d'une conception assez singulière.

Quelles leçons tirons-nous de la façon dont a été menée la bataille ces 20 dernières années ?

Il y aurait beaucoup à dire sur les présuposés que vous déclinez avec beaucoup d'aplomb et un peu de simplisme. Au coeur de votre argumentaire, il y a cette question réthorique autour de la prééminence des lois de la République sur les prescriptions religieuses. Ce n'est pas de même nature et c'est cette conscience qu'il faut faire grandir. Bien sûr que seule la loi de la République régit la vie en société car elle procède de la souveraineté populaire. Et pourant, elle ne dit pas tout de l'existence de chacune et de chacun. Vous ne devriez pas reprendre les termes de cette question sans les discuter. C'est ajouter de la confusion, c'est prendre le risque de se tromper sur la religion, sur la République et donc sur la laïcité et la nature des problèmes dans lesquels elle est si souvent convoquée à tort et à travers.

André Chassaigne citait ce poème d'Aragon, "Celui qui coryait au ciel, celui qui n'y croyait pas, tous deux adoraient la belle prisonnière des soldats". La belle, la République française, c'est une ode à l'alliance, à la défense de ce qui nous est commun.

Ce projet n'y répond pas. Il appelle principalement trois critiques : inefficace quant à ses objectifs, irrecevable du point de vue du droit et soupçonnable d'être manoeuvrier.

Manoeuvrier, tout d’abord. Car si parmi les questions convoquées certaines sont graves et douloureuses, nous savons combien la laïcité est instrumentalisée depuis plus de vingt ans dans le débat public. Certains s’en servent pour diviser les milieux ouvriers et populaires alors qu’elle est faite pour rassembler, certains la réduisent à une liste d’interdits alors qu’elle est une grammaire vivante, certains l’utilisent même pour justifier une forme de racisme auquel ils croient pouvoir donner ainsi une apparence républicaine.

Vous avez voulu ouvrir la boîte de Pandore et déjà, on a vu qu’il y avait un appel d’air et que le concours Lépine de la proposition la plus détestable et l plus polémique avait été lancé. Mais n’était-ce pas le but ?

Nous devrons donc figurer dans cette mauvaise pièce, dans les jours qui viennent, dans laquelle nos compatriotes de confession musulmane se voient de fait, plus ou moins insidieusement, placés au banc des accusés. C'est ainsi que nombre d'entre eux le vivent comme j'ai pu le constater dans ma circonscription et la méthode du patchwork qui a présidé à l’écriture de votre projet de loi y contribue en venant amalgamer dans un même ensemble, des pratiques et des sujets tous rangés au rang du danger intégriste. Et il est à craindre, que vous le vouliez ou non, que tout cela vienne légitimer des discriminations et alimenter l’affrontement identitaire qui fait tant de dégâts dans les esprits, que tout cela vient apporter du carburant à des ennemis de la République et de l’humanité. Nul ne méconnaît les dangers de « l'absolutisme religieux », pour reprende la formule d'Aristide Briant. Les entreprises intégristes, sectaires, terroristes avec ses actes monstrueux, les tentatives d'emprise, les mécanismes de soumission, les atteintes à la dignité des femmes, les relents de fascisme contemporains qui sont à l'oeuvre dans le monde, nul ne peut ignorer ce climat, cette ambiance propices à des pulsions de peur, de repli, de ressentiment, la violence des rapports sociaux, la quête de bouc émissaire, de racisme. Non, le national populisme qui instrumentalise la laïcité, n'est pas l'anti-thèse de l'intégrisme qui instrumentalise la religion, ce sont les deux faces d'une même médaille. Ces réalités, celles d'une société fracturée, fractionnée, divisée, appellent plus que jamais au respect de la dignité humaine et à un nouvel élan pour une République aujourd'hui en proie à une crise dont la solution n'est pas dans des actes d'autorité.

Irrecevable, ensuite. Car dans ce texte, il est essentiellement question d’ordre public, à quoi ni la laïcité, ni la République ne sauraient être résumées. Après la loi sécurité globale, après le recours répété à l’état d’urgence, vous êtes encore enfermés dans votre matrice autoritaire, dans votre conception d’une société bien ordonnée, bien rangée, bien quadrillée, où l’on durcit toujours plus les peines en vain, où l’on accroît les moyens de la surveillance, où l’on remplace la liberté par l’autorisation, où l'on pratique l'ingérence.

Les problèmes auxquels le projet prétend s’affronter ne peuvent pas se résoudre simplement avec des mesures d’ordre public, des mesures qui viennent toucher à des droits fondamentaux comme la liberté d’association, installant avec ce pseudo contratn un principe de soupçon préalable et généralisé. Et encore, s’il en reste la charpente, le Conseil d’Etat a réfréné vos ardeurs, et vous avez dû rebrousser chemin sur un certain nombre de questions, notamment quand le recours à l’interdit et l’arbitraire se faisait trop pressant. Au fond, la question posée est la suivante : est-ce en reniant ou en rognant nous-mêmes ce qui fait le socle de la République que nous parviendrons à réduire les offensives des adversaires de la civilisation humaine à néant ? A un moment, cette attitude ne revient-elle pas à leur donner force en leur concédant une forme de résultat sur lequel ils jouent comme un levier ? 

Inefficace enfin, car en fin de compte, ce texte permettra-t-il de conforter le respect des principes républicains et de faire face aux intégrismes ? Reste à savoir par quels canaux ils passent pour gagner du terrain et votre diagnostic apparaît souvent fragile.

Cela étant, si l'on mesure les dangers en droit d'un certain nombre de mesures quelle sera leur portée réelle dans la lutte nécessaire contre les intégrismes ? Ne s’agit-il pas finalement pour l’essentiel de mesures d’affichage ? En effet, par-delà les critiques sur l’esprit de la loi, certaines appellent d’autant moins d’opposition qu’elles semblent ne pas changer grand-chose. Et il faut dire que certaines apportent une garantie utile à la mise en actes de la République et à sa protection. Je pense notamment à celles qui renforcent la protection des agents de la fonction publique, à celles qui visent à mieux contrôler les écoles hors-contrat ou encore à celles qui visent à assurer la transparence des flux financiers. 

Face à la gravité des menaces et des drames, nous avons besoin d’une société pleinement mobilisée contre les intégrismes et les terrorismes, sans naïveté ni renoncements, avec une puissance publique agissante et réactive, disposant des moyens nécessaires. Car oui, il faut être farouche pour la République. Il faut, bien sûr, utiliser les moyens juridiques dans le respect des libertés communes pour empêcher les ligues factieuses de s'organiser mais il faut inlassablement lever la voix contre eux, partout.

Il faut donc une réaction populaire, citoyenne, politique, sociale, culturelle. Il faut que partout où ils s'insinuent, ils trouvent à qui répondre et que celles et ceux qui s'y emploient, sachent qu'ils ne sont pas seuls. Cela se joue sur le terrain, là où la misère est instrumentalisée avec le mal-vivre, l'exploitation, le mépris, là où ces mouvements trouvent leur financement, là où ils essayent d'installer leur terreur et ils font ployer les esprits. Nous devons appeler donc à une grande réaction citoyenne. C'est là que pourra prendre force le principe de laïcité, principe moteur de la République en cela qu'il protège et promeut la liberté de conscience, l’égalité des droits et la volonté fraternelle.

Oui, il faut la défendre contre ceux qui veulent l’asservissement des esprits, l’inégalité des personnes devant la loi et la violence des rapports humains. Oui, il faut combattre au quotidien ces intégrismes, ces mouvements politiques qui entendent asseoir leur domination et imposer leur vision du monde, en se gardant de ne pas les voir là où ils sont comme de les voir là où ils ne sont pas. Oui il faut démanteler les mécanismes du choc des civilisations. Oui, il faut une République en actes. Et cela ne peut exister sans un combat déterminé et unitaire contre les discriminations et pour l'égalité. Cette exigence politique porte en elle la possibilité de la créolisation, la possibilité de la rencontre, la possibilité d’une émancipation partagée. La question, c'est celle de la crise de sens, de civilisation, d'un nouveau projet républicain, de nouveaux horizons, de nouveaux rêves communs.

Il s’agit donc de produire un effort anthropologique, donc culturel et donc politique, pour sortir de l’ornière de l’affrontement identitaire. Rassembler, rencontrer, partager entrechoquer nos imaginaires et nos visions du monde, faire du commun. C’est difficile dans un monde marqué par cet affontement-là et par la domination du capitalisme qui se fonde sur les inégalités.

Il est possible de faire reculer les intégrismes, si nous sortons de cet enfermement et de ces crispations, si la République est là, si elle rend les services qu’on est en droit d’attendre d’elle, si elle accompagne celles et ceux qui sont fragilisés, si elle garantit les libertés, si elle appaise le peurs au lieu d'en jouer, si elle propose un horizon. Il est possible de construire cette République, d'amorcer une réappropriation là où s'est installée la désaffection en s'appuyant sur le meilleur des aspirations pour en faire un mouvement puissant des femmes et des hommes pour l'égale dignité autour de la promotion de biens communs.

La laïcité établit que la souveraineté réside dans le peuple en tant qu'association de femmes et d'hommes libres, égales, égaux. « Démocratie et laïcité sont identiques » proclamait Jean Jaurès en 1904 et il y a danger lorsque la règle se traduit au lieu de l'égalité des droits quelles que soient les convictions religieuse ou philosophiques, par l'inégalité avec en sus la discrimination sur la base de ces convictions. Le fondateur de L'Humanité décrivait comme fruit « d'une patiente œuvre de rassemblement et d'appaisement ». Il la décrivait comme comme « une œuvre de liberté, une œuvre de loyauté, une œuvre hardie dans son fond mais qui ne cache aucun piège, qui ne dissimule aucune arrière pensée, une œuvre de sincérité ». Puisse cet état d'esprit nous imprégner.

Quant à Aristide Briant, il affimait en conclusion du débat son souci que la réforme puisse – je cite - « affronter sans péril pour la République, les critiques de ses adversaires afin de ne pas s'affaiblir en leur prêtant le flan ». Cela lui faisait dire « Nous n'avons pas le droit de faire une réforme dont les conséquences puissent ébranler la Répubique ». Puisse cet appel nous inspirer.

 

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Urgence contre la désertification médicale

Urgence contre la désertification médicale - Discussion générale - séance du 20 janvier 2022

 

Quarante-cinq médecins en 2015, vingt-trois aujourd’hui : c’est la situation de la ville d’Istres, 50 000 habitants, dans ma circonscription. Devant cette dégradation rapide, les patients s’inquiètent et s’organisent avec le concours de la municipalité. Au niveau national, 11 % des habitantes et des habitants sont sans médecin traitant, c’est-à-dire sans suivi, sans cette relation de confiance, et parfois sans soins. Les déserts médicaux gagnent du terrain – 8 millions de personnes sont concernées dans notre pays – et les inégalités sociales et territoriales de santé s’accroissent. Les mesures prises ont hélas fait la démonstration de leur insuffisance. La puissance publique a le devoir d’agir pour garantir l’égal accès de tous aux soins, et pour cela, il lui faut une série de leviers. Nous avons soutenu les dispositifs incitatifs, mais il faut une stratégie plus volontaire.


À de nombreuses reprises, des propositions ont été mises sur la table : encore dernièrement, au mois de décembre, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine avait déposé un texte sur le sujet. Dans une telle situation de pénurie et d’inégalités, il est nécessaire de recourir à la régulation : le conventionnement sélectif, n’autorisant une nouvelle installation dans une zone surdense qu’en cas de départ d’un médecin ; et l’appel aux services des internes, invités à exercer pendant un temps donné dans les zones les moins bien dotées, dans le cadre d’une meilleure reconnaissance de leur formation, qui irait de pair.


Ces propositions soulèvent quatre objections.


La première consiste à dire qu’il s’agit d’installer un régime de coercition. Chères et chers collègues, la coercition, avec la multiplication des contrôles dans la vie quotidienne, on commence à bien savoir ce que c’est, et vous n’hésitez pas à en user en le justifiant par la situation de crise. Or nous sommes en crise du point de vue de l’accès aux médecins, et il s’agit de dispositifs très raisonnables.


La deuxième objection s’applique à contester le fait qu’il existe de si grandes inégalités et des zones surdenses. Elle ne résiste pas à l’expérience. Oui, il y a des inégalités dans la répartition des médecins, comme l’indiquent les études de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES). Les territoires ruraux, les quartiers populaires et les villes moyennes sont particulièrement touchés.


La troisième objection revient à pointer les effets pervers de ces mesures et à supposer que les conséquences néfastes seraient supérieures aux bénéfices. Ce sont des arguments spécieux, d’autant que vous proposez, de votre côté, de ne rien faire de plus. Nous sommes convaincus que si ces mesures peuvent être insuffisantes, elles seraient bénéfiques.


La quatrième objection est plus symbolique. En réalité, vous refusez que l’on touche à la liberté d’installation des médecins, par conviction idéologique, une conviction qui lie la liberté d’installation à celle d’entreprendre. Mais cette liberté se heurte au droit à la santé. La Constitution oblige la puissance publique à agir.


Les médecins installés craquent devant l’afflux de patients. Les jeunes médecins s’inquiètent devant l’ampleur de la tâche et cherchent à réinventer leur métier. Un certain nombre d’entre eux sont attirés par l’exercice collectif de la médecine, parfois par le salariat. Nous pensons, pour notre part, que le développement de centres de santé publics, mutualistes, à but non lucratif, devrait être un axe d’action, même s’il ne saurait représenter la seule réponse au problème. Il va donc falloir se doter de leviers nouveaux.


La réponse qui consiste à dire que ce n’est qu’un moment difficile à passer et qu’il est urgent d’attendre l’éventuelle embellie de 2030 est insupportable. Il semble même que la majorité l’ait compris, inconsciemment, puisqu’elle est sur la défensive, dressant la liste des choix que personne, ici, ne remet en cause et se gargarisant d’avoir supprimé le numerus clausus alors que personne ne l’avait fait auparavant – évidemment, sinon vous n’auriez pas pu le faire… Voilà des décennies que notre groupe combat le numerus clausus. Encore faudrait-il faire sauter le verrou de Parcoursup, donner des moyens aux universités et ne pas s’engager dans la voie d’une université de la sélection par l’argent – elle est déjà suffisamment inégalitaire. De nombreux jeunes voudraient entrer dans les métiers de la médecine et du soin, et ils en sont empêchés, alors que les besoins ne feront que s’accroître.


Reste que ce n’est pas le sujet. Vous ne devriez pas prendre les propositions de ce texte comme des mises en cause de votre action, mais comme une opportunité d’agir. De plus en plus de voix s’élèvent en effet pour demander de nouveaux leviers d’action face aux déserts médicaux.

 

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Ces mesures ne permettront pas de relever l’hôpital public

Amélioration du système de santé par la confiance et la simplification - Discussion générale - 30/11/2020

 

La proposition de loi qui nous est présentée aujourd’hui n’a sans doute plus grand-chose à voir avec son intention initiale, d’abord parce qu’on subodore que, voyant passer devant lui un véhicule législatif, le Gouvernement n’a pas résisté à la tentation de faire du covoiturage, au risque de le transformer en omnibus, ensuite parce que la commission a été le théâtre d’une réécriture massive et d’ajouts conséquents. Nous voici donc en présence d’un texte qui prétend mettre en œuvre les mesures, ou plutôt des mesures organisationnelles du Ségur, alors qu’un comité de suivi a été mis en place – a-t-il d’ailleurs été consulté ? – et que de surcroît sa composition, donc sa légitimité est contestée.

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téléphone : 04 42 02 28 51 - 04 42 02 28 53

 

Dans votre ville un jeudi par mois sur rendez-vous 

  • Port-Saint-Louis du Rhône le 1er jeudi du mois de 15h30 à 17h Maison de services au public
  • Istres le 2ème jeudi du mois de 16h à 17h30 Hôtel de ville
  • Port de Bouc le 3ème jeudi du mois de 16h à 17h30 CC Elsa Triolet

 

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